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« Hourra pour nous autres ! »

Voici, en hommage à un grand chanteur de la Nouvelle-Acadie décédé le 24 mars 2016, un article rédigé en mai 2014 pour le Centre du patrimoine vivant de Lanaudière.

Comme à chaque édition de la Grande fête du chant traditionnel de Lanaudière, un chanteur de la région est honoré pour la transmission et la richesse de son répertoire. En 2014, le Centre du Patrimoine Vivant de Lanaudière a rendu hommage à M. Lucien Jetté.

Ce grand homme fait partie d’une espèce en voie d’extinction, les grands chanteurs de tradition orale. Lucien Jetté a mémorisé plus d’une centaine de chansons, simplement à les entendre dans des noces et des veillées familiales et communautaires.

Ces occasions de rassemblement et de fête étaient des contextes favorables pour partager du répertoire. « Les jours de l’An chez mémère Laporte, la maison était ben pleine dure, de tous les voisins pis toute la parenté. Ça chantait pis ça dansait toute la nuit. », se souvient M. Jetté.

De nos jours, les chanteurs traditionnels apprennent principalement leur répertoire, figé, sur des transcriptions, des albums de musique traditionnelle et des enregistrements d’archives qu’ils consultent à répétition pour les retenir. La société s’est transformée et les occasions de rassemblements familiaux sont de moins en moins fréquentes. Le mode de transmission doit-il se métamorphosé ? Quant à lui, Lucien Jetté croit que, dans le futur, la chanson traditionnelle se transmettra dans des veillées communautaires.

Un homme enraciné

Cultivateur retraité, Lucien Jetté habite, depuis sa naissance en 1925, le chemin de la Grande Ligne à Saint-Alexis. Il évolue dans un contexte où toutes les occasions sont bonnes pour chanter. Son père, ses oncles maternels, ses cousins, ses frères, ses sœurs et ses voisins pratiquent également le chant traditionnel.

Une famille de son voisinage a une influence prépondérante sur son répertoire, les Pelland. Originaire de l’Ontario, Romulus et ses fils sont des chanteurs aguerris que Lucien côtoie jusque dans les chantiers.

Les principaux héritiers du répertoire de Lucien Jetté sont ses neveux de La Famille Cantin avec qui il a partagé de beaux moments en famille, sur scène (entre 1998 et 2005) et sur disque (Dans le 5e rang, 2001). D’ailleurs, feu Gilles Cantin, illustre membre de La Bottine Souriante, entretenait une relation particulière avec son oncle Lucien qui lui avait transmis la majorité de son répertoire. Plusieurs de ses chansons sont devenues célèbres grâce à la popularité des groupes La Bottine Souriante et La Famille Cantin. Qui ne connait pas la chanson Dans la grande côte, elle est montée ?

Un chanteur dynamique et habité

Littéralement habité et soulevé par ses chansons, il n’est pas rare de voir Lucien s’accompagner de quelques pas de gigue et de gestes venant soutenir ses propos. L’intensité du plaisir collectif partagé de la chanson est tellement élevée, qu’il termine souvent ses chansons par : « Hourra pour nous autres ! ». Ce rituel de fin de chanson lui provient de son frère Jean-Paul.

Passionné et aimant de la chanson traditionnelle, celle-ci fait toujours partie de son quotidien. Encore à 89 ans, Lucien Jetté chante le soir pour son propre plaisir.

À l’ère des nouvelles technologies et de notre société de consommation, possédez-vous ce luxe de vous auto divertir par les chansons héritées de nos « vieux » ? Il est encore temps d’aller à la rencontre d’hommes et de femmes d’exception comme Lucien Jetté, imprégnés d’une richesse à partager.

Par Philippe Jetté, médiateur du patrimoine vivant consultant pour le Centre du Patrimoine Vivant de Lanaudière, le 12 mai 2014.

Vidéo réalisée par son petit-fils Alex Jetté-Beauchamp.

Une tradition bien vivante qui date du début de la colonie en Nouvelle-Acadie

Philippe Jetté est médiateur du patrimoine vivant et accordéoneux au sein du groupe bien connu Belzébuth. Originaire de Saint-Jacques, il a fait une étude sur les surnoms de sa communauté, la Nouvelle‑Acadie. La Nouvelle-Acadie regroupe cinq municipalités de la région de Lanaudière au Québec (St‑Alexis paroisse et village, St-Jacques, St‑Liguori et Ste-Marie-Salomé) fondés par des Acadiens de la déportation arrivés en 1766.

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